ON LIRA CI APRES L’EXCELLENT ANALYSE EXTRAITE DU BLOG http://artoukets.over-blog.com/article-togo-incendies-de-lome-et-de-kara-117013596.ht
DONT L’AUTEUR EST artoukets (Le blog
de TOUKOKHU Arintokhu)
1- Vous avez dit
incendie de Lomé et de Kara ?
En toute choses considérons les faits,
toujours les faits et encore les faits. Que disent-ils? Je lis dans icilome.com
que « des incendies ont touché plusieurs villes togolaises en ce début d’année,
le 10 à Kara, le 12 à Lomé »[1]. Curieux ! Accidentels ?
Criminels ? Pourquoi cette coïncidence, Kara et Lomé ? Ce sont des questions
que tout le monde peuvent et doivent se poser.
1.1- incendies
accidentels ?
Cette thèse ne résiste
pas une seule seconde à l’analyse. Et pour cause deux grandes villes, leur
quasi simultanéité, le temps de leur démarrage.
Lomé est la capitale du
Togo et son marché est le plus grand du pays. Kara est la capitale du nord et
la région du président de la République. Qui a besoin de poser un acte audible
ne peut que s’attaquer à ces deux régions. Les marchés sont des biens communs
supervisés par l’autorité en place. Ils sont pourvoyeurs de richesse pour le
pouvoir ce qui lui permet mettre en place son action politique. Qui veut
s’attaquer au pouvoir politique ne peut que s’attaquer aux sources de revenus
qui sont son carburant
1.2- incendies criminels
?
- Des
voyous ? Ils préféreraient pouvoir y entrer et voler plutôt. Quel est leurs
intérêts à brûler des marchés. À moins qu’ils n’aient été payés pour le faire.
Alors voyons par qui ?
- Des
opposants ou le pouvoir en place ? Apparemment on a voulu que les incendies
aient un impact psychologique, cause une phobie sur la population sinon on ne
prendrait pas le risque de s’attaquer à deux grands marchés de deux des plus
grandes villes du pays. Si ce sont des opposants qui sont-ils puisqu’il y a une
myriade de partis d’opposition. À moins que le pouvoir en place…
1.2.1- incendies politiques
?
1.2.1.1- De la responsabilité des
opposants ?
Attribuer les incendies à
des opposants revient à politiser ces incendies.
En quoi des incendies
peuvent être un acte politique? Semer la psychose et la panique dans la société
pour désarçonner le gouvernement et montrer son incapacité à protéger le
peuple.
Y a-t-il eu des
antécédents dans l’histoire humaine ? Ils sont légions. Les dissolutions des
gouvernements, les coups d’état sont souvent les épilogues de l’acculement des
gouvernements. Il faut en effet légitimer un coup d’état, un appel à la
démission ou à la dissolution d’un gouvernement en montrant les limites de ce
gouvernement. Pour cela on pose des prémisses.
Pourquoi les incendies
des marchés, outils de travail de la population et sources de capitaux pour
l’exécution de l’action du gouvernement? Nul n’ignore que les marchés sont
pourvoyeurs de capital nécessaire pour la mise en place des structures au
service du Bien Commun. S’attaquer donc à la structure pourvoyeuse des capitaux
qui soutient l’action du gouvernement, c’est s’attaquer de façon détournée à ce
gouvernement. Mais a-t-on les preuves, des signes avant-coureurs d’une telle
responsabilité de l’opposition ? Mais de quelle opposition s’agirait-il dans ce
cas ?
1.2.1.2- De la responsabilité du
gouvernement ?
Le pouvoir en place
aurait-il pu provoquer lui-même les feux pour accuser l’opposition ? Des
élections législatives et locales approchent en grande enjambée, serait-ce que
le gouvernement UNIR/UFC soit à ce point paniqué pour vouloir déstabiliser
l’opposition en lui attribuant des incendies dont elle est étrangère? Cela
aussi ne serait pas un premier modèle du genre.
Que les auteurs de ces
incendies soient des opposants ou les partis au gouvernement, les incendies de
Rome, incendie tantôt criminel tantôt politique (cela dépend des auteurs) a pu
inspirer les uns ou les autres.
1.2.2- L’incendie de Rome sous Néron
(37-68 ap JC)
Néron, empereur de Rome
régna de 54 à 68. « Le 19 juillet de l'an
64 après Jésus-Christ, la Ville éternelle est ravagée par un
incendie. L'empereur, après avoir supervisé les secours, se hâte d'engager les
travaux de reconstruction avec l'objectif d'embellir la ville... et de se doter
d'un palais encore plus grandiose que le précédent. La rumeur le soupçonne
d'avoir lui-même provoqué l'incendie dans cette intention. Pour s'en défendre,
il laisse accuser les chrétiens d'en être à l'origine. C'est ainsi que débute
la première persécution de l'ère chrétienne. Parmi ses victimes, des Juifs
dénommés Pierre et Paul. » [2].
« Les sources
d'information antiques sont unanimes pour admettre que l'incendie serait d'origine
criminelle en insistant sur quelques particularités concernant son évolution :
la vitesse de propagation, le fait qu'il se soit propagé dans toutes les
directions, sans suivre la direction des vents, le fait que même des
habitations de pierre aient pris feu, le fait que l'incendie ait repris, alors
qu'il semblait éteint une première fois. »[3]
Dans tous les cas, la
culpabilité de Néron ou celle des chrétiens n’a jamais été établie. Ou plutôt
on pense que l’origine de cet incendie est criminelle car l’incendie a démarré
à plusieurs endroits. Tacite raconte que l’incendie « a été alimenté par le vent et par les
marchandises des boutiques »[4], et pour soutenir la
thèse de la criminalité de l’incendie, il ajoute que « des individus auraient empêché par des
menaces d'éteindre les flammes, et qu'ils les auraient même avivées, déclarant
obéir à des ordres »[5].
Tous les ingrédients se
retrouvent dans le scénario togolais : deux parties qui s’accusent
mutuellement, le pouvoir en place et l’opposition, sans compter qu’une
coïncidence (extraordinaire alors) aurait permis que des malfrats décident de
brûler successivement le marché de Kara et celui de Lomé.
1.2.2- L’incendie du Reichstag
En 1933 il eut l’incendie
du siège du parlement de Berlin. Incendie attribué à tort à un étudiant
communiste, alors qu’il est sûr qu’il soit l’œuvre des nazis. Dans tous les
cas, Hitler s’en servira pour suspendre les libertés individuelles et réprimer
toute opposition. En tout cas au Togo, c’est la lecture que fait l’opposition
des conséquences des incendies des marchés de Kara et de Lomé dont on leur
attribue la paternité.
1.2.3- De la destruction
comme arme politique
Ce qui est à verser peut
être ou non dans la théorie du complot est l’accusation portée contre le
gouvernement américain pour avoir laissé attaquer Pearl Harbor par les
japonais afin de trouver prétexte pour entrer dans la seconde guerre mondiale.
Une accusation similaire est portée contre Georges Bush pour avoir laissé
détruire le World Trade Center pour certains, ou de
l’avoir financé pour d’autres, afin de pouvoir envahir l’Iraq pour sa richesse.
Collin Powell, Secrétaire d’état américain, devra batailler dur aux
Nations-Unis en 2003 pour démontrer que Saddam Hussein possède les Armes de
Destruction Massive (ADM) afin de légitimer l’invasion américaine de l’Iraq.
Porter à la dimension togolaise, les incendies auraient pu permettre au
gouvernement de faire porter le chapeau à l’opposition afin de la déstabiliser
à la veille des élections législatives et locales. Cette nuisance s’est
manifestée par des arrestations de ses leaders. La même accusation est faite
par l’opposition qui se fait une victime innocente dans cette affaire.
2. Quand l’opposition
devient son propre bourreau
2.1- une opposition théocratique
L’’opposition verse pratiquement dans la
mystique plutôt que de faire de la politique. Certes, l’allégorie, la parabole
sont des figures de styles et l’histoire du peuple d’Israël peut avoir des
parallèles avec les peuples de la modernité. Mais cela ne doit pas faire
oublier que le Togo est un pays laïc et qu’il doit le demeurer. De plus, dans
un contexte de la « crise des civilisations » où nos états modernes, héritiers de la
démocratie grecques sont confrontés à des mouvements théocratiques radicaux qui
ne reculent devant rien pour instaurer leur règne d’une part, dans un pays
multiconfessionnel pour lequel la République laïque doit constituer le ciment
entre les centaines d’ethnies et de mouvements religieux, un ou des partis qui
aspire à diriger un tel pays ne peut s’adonner à une terminologie qui exclut
une partie de la nation. L’enseignement des vérités des religions ne relève pas
des affaires de ce monde et concerne la vérité subjective de la conscience de
soi. Il est aussi vrai que si l’exercice du politique est souvent dévoyé et
montre ses limites, comme semble le penser l’opposition, il est de fortes
chances que l’on soit tenté de remplacer cette autorité politique par une
transcendance à qui l’on attribue toutes les perfections que l’on puisse
imaginer et à laquelle on a plutôt recourt[6].
Faisons nôtre la devise « à chacun son job ». Une opposition politique doit faire de
la politique et non des prédications. Le Togo a suffisamment de religieux et de
qualité pour nourrir spirituellement les croyants de tout bord pour que
l’opposition récupère les livres saints, les processions, les messes, les
veillées de prières à son compte. Les croyants de tout bord devraient se méfier
de ce genre de récupération qui ne peut que dévoyer le sens des écritures.
Recourir à ce genre de stratagème est l’expression du désarroi et de manque
d’inspiration. Aux prêtres, marabouts, charlatans, la promesse du bonheur par
des prières, des sortilèges et des poudres, aux politiques l’usage des sciences
économiques, de développement, de management… pour construire la société
togolaise moderne. Le peuple togolais ne peut pas compter sur des hommes
politiques qui n’ont que la prière à la bouche pour faire avancer le pays. La grâce a été déjà
donnée et la
balle est dans notre camps. La spécialisation du travail est une réalité au
Togo : le clergé de toutes les religions représentées au Togo et leurs fidèles
rendront à Dieu ce qui est à lui, les autorités politiques appelés a organiser
le temporel feront tout leur possible en s’appuyant sur la connaissance et les
sciences de ce monde pour donner à leur peuple ce dont il a besoin pour nourrir
son corps. Aux uns le spirituel aux autres le temporel. Pas de mélange de genres.La vision de l’homme et
de la société véhiculée par les religions … (quelle qu’elle soit et à des
degrés différents), constitue un obstacle, voire un danger, pour la réalisation
de la société démocratique. Quant à la pensée démocratique empreinte de neutralité
et de tolérance à l’égard des croyances religieuses privées, elle cherche
plutôt à promouvoir une nouvelle morale objective [7].
2.2- Le « tour de Jéricho » ou les
derniers jours de Jéricho, une pièce à conviction
Les faits encore les faits. On notera que
quelques jours avant le déclenchement des incendies, l’opposition a appelé à
une série de marches dénommée ‘’tour de Jéricho’’ du nom de cette ville d’Israël des débuts
de l’histoire sainte. Pour mémoire le « tour de Jéricho » est un récit biblique dénommée la « Prise de Jéricho
(Josué 5.13-6.27) ». La prise de cette ville qui était fermée au peuple
de Dieu se fera après 7 tours à l’issue desquels la ville tombera dans les
mains du Peuple de Dieu. Quelques extraits pour nous éclairer davantage :
Josué 6, 2-5.26 « 1 Jéricho était fermée,
barricadée devant les Israélites. Personne n'en sortait et personne n'y
entrait.
2 L'Eternel dit à Josué: «Regarde, je livre entre tes mains Jéricho et son roi, ainsi que ses vaillants soldats. 3 Faites le tour de la ville, vous tous les hommes de guerre. Faites une fois le tour de la ville. Tu agiras ainsi pendant six jours. 4 Sept prêtres porteront sept trompettes retentissantes devant l'arche. Le septième jour, vous ferez sept fois le tour de la ville et les prêtres sonneront de la trompette. 5 Quand ils sonneront de la corne retentissante, quand vous entendrez le son de la trompette, tout le peuple poussera de grands cris. Alors la muraille de la ville s'écroulera et le peuple montera à l'attaque, chacun devant soi.»…26 Ce fut alors que Josué jura: «Maudit soit devant l'Eternel l'homme qui se lèvera pour reconstruire cette ville de Jéricho! Il en jettera les fondations au prix de son fils aîné et il en posera les portes au prix de son plus jeune fils.»
2 L'Eternel dit à Josué: «Regarde, je livre entre tes mains Jéricho et son roi, ainsi que ses vaillants soldats. 3 Faites le tour de la ville, vous tous les hommes de guerre. Faites une fois le tour de la ville. Tu agiras ainsi pendant six jours. 4 Sept prêtres porteront sept trompettes retentissantes devant l'arche. Le septième jour, vous ferez sept fois le tour de la ville et les prêtres sonneront de la trompette. 5 Quand ils sonneront de la corne retentissante, quand vous entendrez le son de la trompette, tout le peuple poussera de grands cris. Alors la muraille de la ville s'écroulera et le peuple montera à l'attaque, chacun devant soi.»…26 Ce fut alors que Josué jura: «Maudit soit devant l'Eternel l'homme qui se lèvera pour reconstruire cette ville de Jéricho! Il en jettera les fondations au prix de son fils aîné et il en posera les portes au prix de son plus jeune fils.»
Quant au « tour de Jéricho »
à la togolaise, nous osons croire qu’il n’avait pas pour objectif de
conduire le Togo en ruine comme ce fut le cas de la Jéricho biblique :« 20Ils
s'emparèrent de la ville 21 et vouèrent à la destruction, en
le passant au fil de l'épée, tout ce qui s'y trouvait: hommes et femmes,
enfants et vieillards, jusqu'aux bœufs, aux brebis et aux ânes. »
Il n’est pas surprenant de se poser des
questions du rapport ou non des incendies de Kara et de Lomé avec le « tour de
Jéricho » à la togolaise quand on a lu le texte cité. L’opposition y voit
d’ailleurs des signes des temps et certains ne manquent pas de faire le rapport avec
les ruptures des ponts d’il y a quelques années: «Ayant appris qu’un
second incendie venait de se déclencher à Lomé….nous avons immédiatement fait
le pont avec 2008 sous le même Faure Gnassingbé où neuf ponts presque au même
moment avaient cédé sur tout le territoire. Des inondations monstres
s’ensuivront d’un degré jamais atteint. En souvenir de ces événements qui
semblaient annoncer que la gouvernance de celui-ci n’est pas de bon augure pour
le pays, nous nous sommes dit que sûrement, ces incendies seraient d’origine
spirituelle, donc relèveraient de la volonté de Dieu pour marquer la décadence
et la fin d’un pouvoir illégitime.»[8] Serait-ce que les auteurs des incendies
des marchés de Kara et de Lomé soient les mêmes que ceux ont provoqué la
rupture des ponts, du moins pour certains ? C’est à la justice de prospecter
dans cette direction.
Nous espérons que l’interprétation que
l’auteur de cet article fait de la situation présente n’engage que lui et non
toute la classe politique et principalement l’opposition. Comment le politique
peut-il prendre ses responsabilités quand on voit dans les événements du
temporel des volontés spirituelles ou divines. Autant lâcher prise, car qui
peut théoriquement s’opposer aux forces divines ? Il y a comme une mentalité de
la période théologico-politique comtienne qui gère le quotidien des togolais.
Dans tous les cas, l’histoire de la prise
de Jéricho biblique devant
finir par la chute de cette ville, le gouvernement togolais ne pouvait ne pas
prendre ses responsabilités face à ce que certains voulait voir comme le temps de Dieu. Ne pas le faire entrainerait "la
subordination du pouvoir temporel au pouvoir spirituel"[9].Wunemburger, doyen de la
faculté de philosophie de Lyon 3 dans sa conférence sur le ‘’l’état
démocratique et le retour du religieux’’ citant jacques Maritain lui
fait dire : « je dis que par nature, le corps politique qui appartient à l’ordre
naturel, n’a charge que de la vie temporelle des hommes et de leur bien commun
temporel. L’état moderne n’est dans son ordre sous le contrôle d’aucune
autorité supérieure »[10]. Ceci étant, le
gouvernement togolais n’avait pas à s’inscrire dans la logique moyenâgeuse de
l’interprétation spirituelle de ces incendies.
On aurait bien voulu avancer la thèse de
la présomption d’innocence mais quant on entend certains leaders politiques on
se demande si ce n‘est pas à dessein ou par défi qu’ils semblent vouloir
s’attribuer la paternité de ces incendies. On peut aussi être amené à penser
que cette opposition tente une récupération de ces incendies pour en faire une
lecture apocalyptique, spirituelle surfant sur la crédulité du peuple togolais
croyante dans sa majorité, en vu de créer une psychose et déstabiliser le
gouvernement. Ou purement et simplement pour jouer aux martyrs afin, pour
certains anciens collaborateurs du régime actuel, de donner les gages de leur
mue d’une part, et prendre la communauté internationale à témoin sur la dérive
dictatoriale du pouvoir en place. En effet quand on entend un certain maître
Afangbédji affirmer que par le dernier tour de Jéricho« Nous appelons
à ce que Dieu intervienne » à la question du journaliste de savoir si
cette fois-ci ce tour donnerait quelque chose alors que tout ce qui a été
entrepris jusqu’ici n’a rien donné, on peut se demander de quelle intervention il
fait allusion et de quelle façon il pense que Dieu va intervenir ? De même, à
la question de savoir en quoi consiste le tour de Jéricho, Maître Gil-Benoît Afangbédji répond: « (…) Nous pensons qu’avec ces
manifestations que nous avons dénommées, « les Derniers tours de Jéricho »,
nous allons faire en sorte que les difficultés que nous rencontrons dans ce
pays, soient retournées, soient jugulées, circonscrites, afin que nous
arrivions à asseoir un véritable Etat de doit dans ce pays. C’est ça ce que nous
avons dénommé « Dernier tour de Jéricho », qui aura lieu, les dix, onze et
douze Janvier 2013, d’abord à Déckon, que nous dénommons « Déckon 3 », à
Dapaong, à Kara, à Sokodé, à Atakpamé et puis à Aného…Notre souhait c’est que
nous puissions arriver à amener le gouvernement en place, à écouter les cris
stridents, aigus de ce peuple qui croupit dans la misère... Bref, nous disons
que, par ces manifestations et avec le concours de Dieu, nous allons pouvoir
faire plier les autorités togolaises à régler toutes les difficultés auxquelles
nous sommes au jour d’aujourd’hui confrontés. »[11]Toute opposition, toute
minorité a le devoir voire l’obligation de se faire entendre par des
manifestations, des sitting, mais le rapporter à un fait historique,
passé, religieux même dans une perspective spirituelle dans un pays laïc est-il
judicieux ? « Nous sommes confrontés à une pluralité des morales religieuses
qui voudraient chacune participer au même projet éthique d’une société civile »[12] au Togo : le
christianisme, l’animisme, l’islam, le bouddhisme…Quelle est la place de ces
autres religions dans l’opposition. Les membres des autres religions ne
sont-ils pas obligés de préparer l’avenir de la nation par le biais du prisme
d’une interprétation qui n’est pas la leur ? La pensée démocratique empreinte
de neutralité n’est-elle pas le creuset dans lequel tous les fils et filles du
pays peuvent se retrouver sans se faire prendre en otage dans une religion
quelconque ?
Que pouvait penser tout gouvernement,
quand aux lendemains de ce dernier tour de Jéricho, l’histoire réelle semble se
répéter par les incendies des marchés ? La panique risquait de gagner le peuple
si le gouvernement qui a la responsabilité de gérer le temporel et non le
spirituel ne prenait pas ses responsabilités. Le comble serait qu’il se mette
lui aussi à croire à une puissance divine derrière ces incendies. Ne pas
prendre ses responsabilités c’est laisser l’inquiétude prendre le dessus sur
l’institution, le négatif sur le positif [13].
Les murs du Togo ne sont pas tombés, le
pouvoir en place n’est pas tombé pour que les togolais ne s’évadent plus de la
réalité. Le pouvoir politique est une chose noble à convoiter mais avec des
moyens adaptés à cela, les techniques rationnelles et modernes de la captation
des foules : la communication, les sondages, les meetings purement politiques,
les débats à l’assemblée, les contre-propositions des lois et décision du
gouvernement, les campagnes électorales, etc. laissons à Dieu ce qui est à Dieu
et utilisons les moyens rationnels pour contrôler et encadre l’œuvre de César.
Le Togo est un état laïc aucun parti politique ne devrait verser dans le
mysticisme au lieu de faire de la politique. Si l’époque des coups d’état est
révolue ce n’est pas qu’on tombe dans d’autres travers : les états
théocratiques. Même si Tocqueville pense que la religion peut favoriser et non inhiber la
formation de la démocratie, elle reste et demeure dans le domaine du privé. Aux
Etats-Unis, la religion n’exerce pas son influence sur les lois ni sur les
détails politiques mais elle dirige les mœurs tout en réglant la famille
qu’elle travaille de l’intérieur. C’est cette dernière qui peut par son vote
influencer l’action de l’état.[14].
3. Le même problème :
le radicalisme
Le fair-play est de mise en politique. Certes il est
notoirement reconnu que beaucoup d’élections en Afrique sont entachées
d’irrégularités. Le minimum requis pour la validité de ces élections est la
reconnaissance des organisations crédibles. Quand cela est fait il faut
accorder une accalmie au victorieux pour dérouler son programme. Le tapage qui
se fait aujourd’hui empêche le gouvernement de réaliser son programme dans la
sérénité. C’est le peuple qui perd. C’est l’argent décaissé qui est mal utilisé
; c’est les fonds à décaisser qui ne le seront pas parce que l’atmosphère et
délétère. Empêcher le gouvernement élu de faire sa politique n’est pas le
meilleur moyen de montrer au peuple les lacunes de ce gouvernement. Le Togo est
très pauvre pour se le permettre.
Il est aussi temps de pouvoir s’accorder
un minimum de confiance. Les hommes politiques togolais font plus confiance aux
étrangers qu’à leurs propres frères. Il arrive un temps où la communauté
internationale en a assez. Réclamez à tout bout de champ pour une petite loi
votée ou une décision l’arbitrage de la communauté internationale est puéril. À
quoi riment ces sempiternels dialogues commencés et jamais finis ou jamais
commencés parce que la composition des commissions fait elle-même problème. On
appellera à un pré-arbitrage sur la composition des membres des commissions de
ce dialogue avant le dialogue. Le Togo apparaît ainsi comme un pourvoyeur de
subsides au profit des comités d’arbitrage.
L’opposition d’une certaine génération
s’est laissé piéger par « le discours de la Baule », celle d’aujourd’hui se laisse piéger par
les printemps arabes où on a vu les pays occidentaux se porter au secours
des oppositions contre les pouvoirs en place. Mais ces pays ne sont pas le
Togo. Le Togo ne vaut pas une messe. Ils n’y courraient pas pour l’opposition
mais pour les contrats faramineux qu’il y a au bout. Si le pouvoir en place
leur était favorable ils ne le renverseront pas. Encore faut-il que le pays
regorge des matières stratégiques. Cela étant, l’opposition togolaise doit
compter sur ces propres forces. L’aide étrangère ne devrait être qu’un bonus
mais avec le risque de s’assujettir à elle. Compter sur ses propres forces,
revient aussi à faire la politique de ses moyens parmi lesquels une politique
apaisée et dialogique.
4- Synthèse conclusive :
4.1- une opposition qui monopolise Dieu
L’opposition a toujours usé d’un langage
biblique de tout temps. Ce qui dans ce cas spécifique a pu lui jouer un mauvais
tour. Le dernier tour de Jéricho dans la Bible finit par un carnage ; le tour
de Jéricho à la togolaise finit par des incendies. Quelles conclusions un
esprit sensé peut-il tirer de ces deux événements? Que Dieu a renouvelé se
prodiges ? Sans vouloir faire la critique textuelle du « dernier tour de
Jéricho » de la Bible on peut dire à ceux-là qui font la même lecture des
incendies de Kara et de Lomé qu'ils sont libres de le faire mais qu’ils
n’embarquent pas tout le peuple et encore moins l’autorité politique sur ce
chemin. Les forces de sécurité n’iront pas chercher du côté du ciel les auteurs
de ces actes macabres. Il est d’ailleurs idiot de vouloir voir récidiver les « mirabilia Dei »
bibliques qui sont des écrits spirituels et dont les
interprétations doivent être spirituels.
Il est d’ailleurs abusif d’user du langage
religieux comme si le religieux avait toujours porté avec lui des valeurs
juridiques et éthiques ; au contraire « l’expression historiques des valeurs
morales religieuses a constitué un frein pour la réalisation de la démocratie »[15].Quant à Archambault, il pense que "ce n'est pas d'un
monde extérieur que peut tomber, comme une intrusion, c'est au plus intime de
nous-mêmes que doit surgir, comme une stimulation ascendante, ce qui va être
notre lumière et notre salut"[16]. Seul un cadre positiviste et républicain
peut garantir une entente cordiale entre les fils et filles appartenant à des
milieux confessionnels différents. Ce cadre doit être régi par la seule raison.
Celle-ci doit exclure dans sa démarche d’édification d’une société juste, moderne et
démocratique, « tout ce qui prétend régir la pensée ou l’action (politique)
d’une manière purement extrinsèque : donnée brute, postulat, pari pascalien,
impératif catégorique, critère pragmatique, autorité inconditionnée, etc.»[17].
Qui suit quotidiennement l’actualité
togolaise peut faire du « dernier tour de Jéricho » un bon larron pour pêcher en eau trouble. D’où nécessité de ne partir que sur
des faits avant d’incriminer qui que ce soit. Et quels sont ces faits : des
incendies, des accusateurs qui peuvent avoir été manipulés, ou qui l’ont fait
de leur propre chef en interprétant par eux-mêmes l'appel des leaders de
l'opposition pour un « dernier tour de Jéricho ». Qu’en est-il des empreintes sachant que celles-ci peuvent avoir
été transplantées d’un lieu à un autre ? Les évidences semblent bien sûr
indiquer d’où peuvent venir les incendies mais encore faut-il en apporter des
preuves convaincantes. La présomption de culpabilité ne peut servir de preuve.
Elle a le même pourcentage que la présomption d’innocence dans ce cas-ci.
Si l'opposition a une leçon à tirer de cet
épisode c'est qu'elle doit se méfier de la récupération des thèmes bibliques
qui la ligote pieds et mains pour la livrer à son adversaire politique. Si elle
est obligée d’aller pêcher dans les écrits saints qu’elle jette alors son filet
en eau profonde en
allant au-delà de la rive de la lettre pour l’esprit de la lettre afin que la pêche soit miraculeuse. Personne ne nie que la politique et le religieux peuvent se
rencontrer pour s'accorder ou se détester. Mais dans un contexte mondial où le
religieux semble marquer son retour spécifiquement par son côté obscurantiste,
les leaders politiques devraient user de précaution avant d'évoquer les thèmes
religieux. On attend d'eux des propositions pour sortir le pays de l'ornière et
non pour montrer au peuple la direction des sanctuaires.
C’est l’occasion où jamais de penser à
moderniser les marchés des grandes villes, de les munir du matériel de
surveillance électronique sophistiqué, d’anticiper sur les lieux névralgiques
en matière d’incendie pour installer les bases des pompiers à proximité.
Celles-ci doivent se créées dans toutes les grandes villes et non seulement à
Lomé et à Kara.
4.2- se départir de la culture de la
violence
Le Togo a cette mauvaise presse d’avoir
ouvert le concert des coups d’état en Afrique. Il lui faut apprendre d’autres
manières d’accéder à la magistrature suprême. Et la seule dans une république
démocratique ce sont des élections et encore des élections. En arrivée aux
luttes armées ou aux incendies alors qu’on n’a pas épuisé toutes les voies de
dialogue ne peuvent servir de raccourci.
Il n’est pas honteux de demeurer dans
l’opposition même pendant des décennies. On peut être dans l’opposition tout en
participant à la construction de la nation par des contre-propositions, en
figurant dans des commissions parlementaires et les votes parlementaires, peu
importe si ce sont les idées de la majorité qui l’emportent. C’est le jeu
démocratique.
[1]
icilome.com
[2]
Herodote.net,
[3]
Wikipedia.org, article ‘’grand incendie de Rome »
[4]
Ibid.
[5]
Ibid.
[6]
WUNEMBURGER, l’état démocratique et le retour du religieux conférence prononcée dans le
cadre des cycles de conférences ‘’laïcité et fait religieux aujourd’hui, Lyon,
15/10/ 2003
[7] cf. supra
[8]SIMOUBA, Alain, Les derniers tours de
Jéricho et la volonté du Pouvoir de divertir l’opinion : Y a-t-il un lien entre
la mise des casernes militaires en état d’alerte et l’incendie des marchés ?, in icilome.com, 13/1/2913
[9]
WUNEMBRGER, op.cit.
[10]
Cf. supra
[11
icilome.com
[12] WUNEMBURGER, op.cit.
[13] cf. supra
[14] Ibid.
[15]
Ibid.
[16]
ARCHAMBAULT, Paul, Initiation à la philosophie de Maurice Blondel, 1941, p. 28
[17] Ibid.
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