FAURE
GNASSINGBE
MESSAGE A LA NATION A L’OCCASION DU 53 E
ANNIVERSAIRE DE L’INDEPENDANCE
Togolaises, Togolais
Mes Chers compatriotes,
A quelques heures de la célébration de la fête notre indépendance,
c’est un privilège pour moi, de m’adresser à vous, quel que soit l’endroit où
vous vous trouvez.
C’est ensemble que nous commémorons, avec fierté, le
souvenir des luttes héroïques que le Peuple togolais a menées, pour retrouver,
il y a tout juste 53 ans, la liberté, la dignité et la maîtrise de son destin.
Ce furent des luttes âpres, des combats douloureux. Ces
épisodes de notre histoire commune, ont brisé des vies et sacrifié
de trop nombreux compatriotes.
Il me tient à cœur, de saisir ce moment unique de communion
nationale, pour renouveler l’hommage, que nous devons rendre sans nous
lasser et sans aucune réserve, aux combattants de la liberté ;
à toutes ces Togolaises et à tous ces Togolais, célèbres ou anonymes, qui ont
tout donné pour que la nation togolaise émerge des ténèbres de l’histoire
et assume son destin.
Je salue tout particulièrement, la mémoire du tout premier
Président du Togo indépendant, Sylvanus Olympio. Nous avons commémoré cette
année même, le cinquantième anniversaire de sa disparition dans le
recueillement et dans un esprit de réconciliation nationale.
A travers l’hommage au Président Olympio, c’est la foi
républicaine et l’engagement des patriotes de tous les temps et de tous les
bords que nous saluons.
Je rends hommage à toutes ces Togolaises et à tous ces
Togolais de bonne volonté, qui ont œuvré et œuvrent encore avec
passion et conviction pour que nous puissions transcender les contingences de
l’histoire et les hasards de la géographie, pour bâtir un destin commun, fondé
sur des valeurs partagées.
C’est le lieu, de rappeler aux acteurs politiques, qu’au-delà des
divergences de choix et des moyens d’action, divergences inhérentes à toute
société pluraliste, nous avons en partage une communauté de destin, faite de
l’héritage du passé, des défis du moment et des promesses de l’avenir. Ces
repères doivent nous exhorter, à tout moment, à ne privilégier que l’intérêt du
Togo, qui est un et indivisible.
Il nous faut donc faire appel à notre engagement patriotique et à
notre sagesse, qui dans les moments difficiles, nous commandent de
préserver l’essentiel : la paix et la cohésion nationale.
Togolaises, Togolais,
Mes chers compatriotes,
Après 53 années d’indépendance, qu’avons-nous de plus précieux à
commémorer, si ce n’est au-delà de tout, ces valeurs si typiquement togolaises
que sont : la culture de l’ouverture et le sens du
compromis.
Ces valeurs qui sont au cœur de notre identité nationale nous
incitent constamment à l’écoute et à l’acceptation de l’autre, dans sa
différence, à la modération et à la tolérance. Elles récusent tous les
extrémismes, toutes les violences, d’où qu’elles viennent.
Je me dois de saisir ce moment de solennité, pour dire avec force,
que nul n’a le droit de remettre en cause ce fonds commun de valeurs.
Ainsi, rien ne peut justifier les incendies criminels qui ont
dévasté les marchés de Kara et de Lomé. Aucun agenda politique, aucun combat de
quelque nature que ce soit, ne peut justifier de tels égarements !
Au-delà des vies brisées, au-delà des immenses pertes subies, les
incendies de nos plus grands marchés soulignent la fragilité de nos acquis. Ils
indiquent de toute évidence que le sens du bien commun, la conscience nationale
peuvent s’affaiblir et régresser. Il n’est pas tolérable de détruire, ce
que nous avons construit ensemble pendant des décennies et des décennies, au
prix de privations et d’immenses sacrifices.
Je sais qu’aucun mot de réconfort ne peut effacer la détresse
humaine qui s’est nouée en ces nuits tragiques du mois de janvier.
Mais je tiens à réitérer aux commerçantes et commerçants qui
ont tout perdu en seul jour, la compassion et la solidarité unanime de
notre nation.
C’est l’occasion pour moi de saluer les efforts que la justice
continue de déployer pour la manifestation de la vérité. Ces efforts doivent
être poursuivis avec détermination et en toute indépendance. Le travail
de la justice doit se faire dans la sérénité et dans le respect des principes
de l’Etat de droit, à toutes les étapes de la procédure.
Le travail de la justice doit aller jusqu’au bout, quoi
qu’il nous en coûte !
Face à une situation inédite et particulièrement difficile, le
Gouvernement a fait au mieux, pour soutenir les sinistrés et les accompagner
progressivement vers un retour à la vie normale.
Chacun peut toutefois lire encore sur les visages de nos
concitoyens, l’étendue de la peine et le désarroi profond. Les
traumatismes affectent encore des milliers de foyers, modestes pour la plupart,
où tout est aujourd’hui remis en cause, parce que tout reposait sur le
dur labeur et le courage d’une mère qui a tout sacrifié pour monter un petit
commerce, aujourd’hui parti en fumée.
C’est pourquoi, le Gouvernement doit impérativement accélérer les
travaux de construction des marchés provisoires. Les commerçantes et aux
commerçants sinistrés ont besoin de reprendre leurs activités sans délai.
Aucune excuse n’est recevable !
Rien ne peut justifier des retards supplémentaires, car chaque
jour qui passe aggrave la précarité et l’angoisse des milliers de nos
concitoyens qui ne vivent que de ce qu’ils gagnent au quotidien.
Togolaises, Togolais,
Mes chers concitoyens,
Les dures épreuves que nous venons de subir ne doivent cependant
pas nous démobiliser. Les nombreux défis politiques, économiques et sociaux
auxquels nous sommes confrontés, ne nous autorisent en effet aucun répit.
Nous sommes engagés dans un combat de longue
haleine.
Nous devons le mener ensemble pour façonner un Togo prometteur,
démocratique et tolérant.
Tous ces défis interpellent quotidiennement notre capacité à
établir une échelle de priorités, conforme aux grands objectifs que nous
nous sommes fixés.
Comme chacun a pu le constater, le secteur de l’éducation
est en proie depuis des mois à des agitations récurrentes.
Les revendications s’additionnent d’année en année,
perturbant ainsi de manière répétitive le rythme de la vie scolaire.
Cette situation est d’autant plus préoccupante qu’elle met en
péril l’avenir de nos enfants.
Nos enfants sont ce que nous avons de plus cher. Ce sont eux qui
doivent mobiliser toute notre énergie. Ils sont notre priorité absolue !
Tous les efforts que nous avons déployés, en réponse aux
revendications des enseignants, sont malheureusement accueillis par de
nouvelles exigences, que nous ne sommes pas en mesure de satisfaire, ici et
maintenant.
Cette situation est intenable car elle alimente des
dérives dangereuses pour l’école togolaise.
Nul ne doit prendre en otage l’éducation de nos enfants,
l’avenir de notre nation.
Aucune revendication quelle qu’elle soit, ne vaut une vie
d’enfant.
Je voudrais saisir l’occasion qui m’est offerte ce jour, pour
condamner fermement l’acte inconsidéré qui a coûté la vie au jeune Anselme
Gouyano Sinandare, précocement arraché à notre affection, durant les récents
évènements. Je m’incline devant sa mémoire, et réitère à la famille
éplorée ma peine profonde et toute ma compassion ainsi que les sincères
condoléances du Gouvernement.
Nous laissons à présent à la justice qui est saisie, le soin de
sanctionner ceux qui méritent de l’être, afin qu’à l’avenir, de tels drames ne
se reproduisent plus au Togo.
Cette mort tragique qui a endeuillé toute la nation
togolaise, nous rappelle aussi que la violence est une impasse.
Elle souligne une fois de plus, la nécessité de privilégier en
toutes circonstances le dialogue et la concertation.
Je garde aussi bon espoir, que l’enquête ouverte suite au
décès du jeune Sinalengue Douti, puisse aboutir dans les meilleurs
délais, afin que toute la lumière soit faite sur les circonstances exactes dans
lesquelles ce décès est survenu. J’exprime d’ores et déjà toute ma compassion à
la famille éplorée et tiens à lui réitérer la solidarité de l’ensemble du
Gouvernement.
Face à tant de drames, il nous appartient, mes chers compatriotes,
de nous ressaisir, de faire courageusement face à nos responsabilités.
Les problèmes de l’école togolaise seront abordés dans toute leur globalité et
avec la sérénité requise.
Je puis d’ores et déjà vous dire, combien le Gouvernement est
préoccupé par la situation toute particulière des enseignants volontaires. Ces
enseignants méritent toute notre attention. Ils vivent dans la précarité,
surtout en milieu rural, où les conditions de travail sont
éprouvantes.
Nous devons tout mettre en œuvre pour leur offrir de
meilleures conditions de travail, à la hauteur de leurs immenses sacrifices.
C’est dans cet esprit que j’ai chargé le Gouvernement
d’organiser très prochainement, bien entendu après les consultations
d’usage, les Grandes Assises de l’Education au Togo.
Les représentants des parents d’élèves, des enseignants, des
syndicats, des élus et des acteurs économiques ainsi que toutes les parties
prenantes de l’éducation, seront conviées à ces assises. Les préoccupations des
uns et des autres doivent être prises en compte pour dégager les
solutions qui garantiront la stabilité et l’accessibilité de tous à un
enseignement de qualité.
La même démarche sera également adoptée pour le secteur de la
santé. Nos établissements hospitaliers et nos unités de soins sont eux
aussi en proie à des remous récurrents.
Que ce soit dans le domaine de la santé ou de l’éducation, il y a
un temps pour revendiquer et il y a un temps pour bâtir ensemble.
Bâtir ensemble, c’est savoir surmonter les intérêts particuliers
et immédiats, si légitimes soient-ils, pour réfléchir à des
solutions durables. Et pour bâtir et non pas seulement revendiquer et contester
indéfiniment, chacun à son niveau doit faire preuve d’un
dépassement de soi. Il s’agit pour chacun d’apporter sa contribution à la
mise en place d’un système de santé qui fonctionne pour tous.
Les professions médicales occupent une place de choix dans
nos sociétés. Celles et ceux qui ont le privilège de les exercer,
ont entre leurs mains des vies humaines. Parce que la vie humaine n’a pas de
prix, le personnel soignant mérite d’exercer sa charge, dans un cadre
valorisant et dans les meilleures conditions de travail.
Mais en retour, le citoyen est en droit d’attendre des
médecins et des personnels soignants, un minimum de compassion et de solidarité
face à la souffrance humaine.
Malheureusement, il me revient que le sens de l’accueil, l’écoute
attentive qui sont la base fondamentale de la profession soignante, font
parfois cruellement défaut dans nos centres hospitaliers. Ceux-ci sont
même comparés à des mouroirs, des lieux où le citoyen démuni sombre dans le
désespoir, faute d’une prise en charge adéquate. Combien de femmes à
terme et sans ressources, n’ont-elles pas ressenti à leur arrivée dans
nos centres hospitaliers, ce sentiment pénible d’abandon et d’indifférence,
d’un personnel soignant dont elles attendent simplement un mot de
réconfort !
Il est temps que le service public de santé regagne ses lettres de
noblesse dans notre pays.
Les préoccupations légitimes des personnels soignants
doivent aller de pair avec une conscience professionnelle accrue.
J’en appelle à un sursaut dans nos hôpitaux, dans nos centres de
santé pour mieux répondre aux attentes du citoyen.
Togolaises, Togolais
Mes chers compatriotes,
Je fonde beaucoup d’espoir sur les Grandes Assises de l’Education
et de la Santé. C’est mon souhait le plus vif que ces assises servent aussi de
prélude à un vaste mouvement de retour aux valeurs fondamentales qui ont fait
jadis, la force de l’administration togolaise.
Il est temps d’inaugurer un nouveau contrat social, basé sur
l’écoute mutuelle mais aussi sur le sens des responsabilités. A l’heure
actuelle, notre pays ne peut se payer chaque année, le luxe d’une crise sociale
majeure.
Nous devons dans cette perspective engager une lutte sans merci
contre la politisation de l’Administration.
L’instrumentalisation des aspirations des travailleurs, la
surenchère politicienne, l’amalgame entre les droits des travailleurs et les
agendas politiques sont des pratiques nocives. Nous devons leur tourner
résolument le dos, car elles desservent notre pays.
Après de longues années d’isolement sur la scène internationale,
nous avons réussi ensemble, à remettre le Togo sur la voie de la crédibilité.
Nous y sommes parvenus au prix d’énormes sacrifices et de privations.
L’élection du Togo au Conseil de sécurité des Nations Unies fut un
premier signal fort du renouveau de notre pays et de la place qui lui est
désormais reconnue dans le concert des nations.
Il nous appartient de garder ce cap. Nos efforts commencent petit
à petit à porter leurs fruits. Nous atteignons en effet des résultats qui
semblaient pour beaucoup hors de portée.
Les premiers résultats enregistrés dans des domaines essentiels
comme l’emploi des jeunes, sont le signe qu’il n’y a aucune sorte de fatalité
pour entraver notre pays, dans sa détermination à atteindre ses
objectifs.
En effet, après les concours de recrutement, notre pays a réussi,
en moins de deux ans, à mobiliser plus de 4000 jeunes diplômés et à leur donner
un emploi, à travers le Programme pour le volontariat national et le programme
Appui à l’insertion et au développement de l’embauche. Ces jeunes contribuent
déjà au développement dans les préfectures, communes et villages où ils sont
déployés.
Grâce au programme de relance du secteur agricole, notre
production céréalière est excédentaire depuis quelques années. La réduction
significative de nos importations pour les produits de consommation
courante est l’une des retombées directes de ce succès. Il nous
reste à présent, à porter à une échelle plus grande, ces exemples de réussite
agricole qui ont déjà permis d’améliorer considérablement les conditions de vie
dans les zones rurales.
Dans la même perspective, la ville de Lomé a connu en quelques
années de profondes métamorphoses, grâce au réaménagement du réseau routier.
Ce que nous avons réussi à Lomé, nous pouvons et nous allons
le réaliser dans les villes de l’intérieur du pays, afin que chaque chaque
région devienne à son tour, un pôle de développement économique et social.
Certes, avec ces progrès tangibles, notre tâche est loin
d’être achevée. Mais ces progrès sont comme des points de repères, des
balises qui doivent nous encourager à accélérer le rythme des réformes,
car ils indiquent, qu’en dépit de tout, nous sommes sur la bonne
voie.
Mes chers compatriotes,
L’Etat doit être au service de nos concitoyens, avec impartialité
et avec intégrité.
Nous devons donc continuer à traquer dans les administrations
publiques ou privées le phénomène des surfacturations, des fausses factures et
autres formes de prévarications.
Ces pratiques alourdissent indûment les charges de l’Etat au
profit de quelques individus. Elles le privent des précieuses
ressources dont il a tant besoin pour la mise en œuvre de nos projets de
développement économique et social.
Nous devons donc continuer à combattre avec énergie, les
abus et les prodigalités qui grèvent durement les ressources de
l’Etat.
Togolaises, Togolais
Mes chers compatriotes,
Comme chacun le sait, les élections législatives approchent à
grands pas. Les retards que nous avons accusés sur le calendrier initial, n’ont
en rien entamé notre détermination à aller jusqu’au bout de nos efforts, pour
que notre pays se dote à brève échéance d’une nouvelle Assemblée nationale.
Je me félicite à cet égard du bon déroulement des opérations de
recensement, sur toute l’étendue du territoire national. L’esprit civique, le
sens des responsabilités dont vous avez fait preuve doivent ainsi continuer à
guider nos pas, durant les prochaines étapes qui nous conduiront aux
élections législatives.
Ces élections sont l’occasion de confirmer la maturité politique
du peuple togolais.
Les innovations et les divers réaménagements apportés au cadre
électoral, sont, j’en suis convaincu, de nature à garantir une compétition
sereine, ouverte et transparente pour peu que chacun y mette un peu de bonne
volonté.
Mon vœu le plus cher, est que tous les courants politiques
puissent s’exprimer à l’occasion de ce scrutin. La démocratie et l’Etat de
droit nous imposent une conduite exemplaire du processus électoral.
Je vous exhorte donc à vous mobiliser individuellement et
collectivement pour son heureux aboutissement.
Togolaises, Togolais,
Mes chers compatriotes,
Nous devons continuer à faire du Togo, un Etat
moderne, ouvert au dialogue, un Etat démocratique qui s’inspire des valeurs
humanistes.
Ce Togo nouveau appelle la collaboration active de tous les
citoyens, de toutes les forces vives de la nation : partis politiques,
institutions, employeurs, travailleurs, membres de la société civile, etc.
Nous devons tout donner pour le rayonnement de cette
terre bénie qu’est le Togo et que nous chérissons tous.
C’est à la lumière de ces considérations que nous devons aborder
les défis d’aujourd’hui et de demain, avec la certitude que la Providence
est toujours du côté de ceux qui sont unis et solidaires.
Bonne fête de l’indépendance à toutes et à tous.
Et que Dieu bénisse le Togo, notre chère patrie
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